Du 16 mai au 18 mai au soir, Marcel Campion offre des tours de grande roue aux Parisiens avant le démontage de celle-ci.
Le forain, pris dans des ennuis judiciaires, suscite bien des passions.

« C’est une grande en gueule », « il n’y a pas plus fidèle en amitié », « il peut choquer dans un monde aseptisé », « on parle de mafia, de clan ».
Le moins que l’on puisse dire c’est que Marcel Campion ne laisse personne indifférent.
A l’heure ou il offre, de ce mercredi à vendredi soir, la gratuité de la Grande roue aux Parisiens* avant son démontage samedi, celui que tout le monde surnomme le « roi des forains » suscite des avis tranchés.

On rit avec lui ou on le combat.
Il n’y a pas de demi-mesure avec cet homme de 78 ans qui roule sa bosse depuis plus de 40 ans.
Ce qui est assez drôle, c’est qu’il provoque un peu les mêmes réactions qu’Anne Hidalgo, la maire PS de Paris, qui l’a privé de marché de Noël et peut-être bientôt de Grande roue place de la Concorde (VIIIe)**.
Avec sa stature de lutteur et sa voix rauque, l’homme n’a pas l’intention de « mourir » sans avoir livré bataille.
D’ailleurs, croiser le fer, il aime ça.
Il a toujours fonctionné ainsi. Il arrive, pose ses manèges et discute après.

« Tous les maires de Paris, que ce soit Chirac, Tiberi, Delanoë ou Hidalgo, ont été confrontés à Marcel Campion, souligne-t-on dans l’entourage d’Anne Hidalgo.
Il est revendicatif et discuter avec lui n’est jamais simple.
C’est un personnage iconoclaste qui a souvent obtenu des choses par des coups de forces comme lorsqu’il a envahi le jardin des Tuileries pour que l’Etat accepte d’y installer une fête foraine. »

 Marcel Campion

De la débrouille au show-business

Cette âpreté à obtenir ce qu’il désire lui vient peut-être de son enfance.
Pupille de la nation, il débute à l’âge où l’on rentre au collège dans les rues de Paris.
« De 12 à 17 ans, j’ai vécu dans la rue. J’avais de petits boulots comme rempailleur de chaises ou je montais et démontais des manèges », attaque ce passionné de guitare.
Dans les années 1960, il se lance dans la fête foraine avec une première attraction : des auto-tamponneuses à Choisy-le-Roi (Val-de-Marne).

Doucement mais sûrement, il gagne assurance et dimension. « Ma première fête foraine, je l’ai montée à Orly grâce au maire de l’époque Gaston Viens.
Il m’a d’ailleurs bien aidé pour travailler ensuite à Argenteuil, Epinay, Drancy ou Gennevilliers. » C’est dans les années 1970 qu’il explose aux yeux de tous.
« J’ai rencontré Bruno Coquatrix (NDLR : directeur général de l’Olympia) dans une foire en Normandie, souligne Marcel Campion. Il m’a présenté à Johnny, Carlos. »
De fil en aiguille il se lie d’amitié avec Yves Mourousi, Jean-Paul Belmondo, Alain Delon, Thierry Le Luron et Régine.

Marcel Campion

«Une tête à jouer dans un Audiard »

« Oui, on se connaît depuis 40 ans ! », attaque la reine de la nuit.
« C’est un homme qui s’est fait tout seul et qui possède une grande honnêteté et qui aime profondément les gens.
Et je peux vous dire que des voyous et des tordus j’en ai vu.
Marcel, lui, est un homme de qualité.
Et je suis très choquée de tout ce qui se passe autour de lui.
Anne Hidalgo, que je trouve par ailleurs intelligente, agit d’une façon que je réprouve. »

Thomas Dutronc est plus prudent : « Dès le début j’ai dit à Marcel que quand c’était trop politique, ce serait sans moi.
Nous sommes copains de guitare et je n’ai pas envie de me retrouver dans ses problèmes. »
Malgré tout, ce passionné de jazz manouche voue une amitié fidèle à Campion.
« Je l’ai découvert grâce à Ninine Garcia (NDLR : guitariste) avec qui je jouais à la Chope des puces.
Alors oui, c’est un personnage haut en couleur, qui a une tête à jouer dans un film d’Audiard.
C’est quelqu’un de généreux et qui sait recevoir, poursuit Dutronc. Il se bat pour défendre une activité ».

Grande roue Paris

« Dès qu’il y a un souci, il gueule»

Aujourd’hui, le roi des forains n’est effectivement plus en odeur de sainteté avec l’exécutif parisien même s’il a soutenu la maire lors de la dernière campagne des municipales.
« Dès qu’il y a un souci ou une décision qui ne lui convient pas, il tente de passer en force. Il appelle les élus.
Il gueule.
On ne trouve pas ce genre de comportement chez un chef d’entreprise normal », glisse-t-on place de l’Hôtel de Ville.

« C’est une attaque structurée contre lui, assène un proche du forain.
On essaye de renvoyer de lui une image négative en le faisant passer pour un mafieux, un chef de bande.
Il a pris des risques financiers mais lui, il ne fait pas partie des grandes fortunes de ce pays. »

Il est tout de même mis en examen pour détournement de fonds et recel de favoritisme dans le dossier de la Grande roue (NDLR : la Ville de Paris est poursuivi pour favoritisme dans l’attribution de ce marché).

Grande roue Paris

«A 100 ans, j’arrête de travailler »

« Dès l’été 2017, il savait qu’il n’y aurait plus de marché de Noël, mais il a fait croire aux forains qu’il aurait gain de cause.
Bilan, ils n’ont pas cherché de plan B et en novembre ils se sont retrouvés sur le carreau.
Cela l’a beaucoup discrédité chez les forains, explique-t-on à l’Hôtel de Ville.
Ses méthodes sont celles d’un monde passé.
Nous sommes à la fin d’un cycle. »

Pour continuer d’exister Marcel Campion a récemment créé Paris libéré.
Cette association, non politique, est censée interpeller les futurs candidats aux municipales de 2020sur les problèmes de propreté, de circulation dans la capitale…

En attendant les décisions judiciaires Marcel Campion garde le sourire.
Il conclut : « A 100 ans, j’arrête de travailler et je pars en vacances. Mais pas avant ».
Les élus parisiens sont prévenus.

*En justifiant d’une adresse parisienne.
**Après un vote du Conseil de Paris.

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